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10 octobre 2019

Quand Domination et argent font (plus ou moins bon) ménage



Tout d'abord et parce qu'il est toujours important de repréciser ce que les mots signifient et de faire cesser les confusions et abus de langage, voici quelques rappels de définitions:

commerce (nom masculin)
- Activité consistant dans l'achat, la vente, l'échange de marchandises, de denrées, de valeurs, dans la vente de services ; 
- métier de celui qui achète des objets pour les revendre.

vénalité (nom féminin):
- Caractère de ce qu'il est possible d'acquérir à prix d'argent : La vénalité des charges.
- Caractère de quelqu'un qui est prêt à se vendre par intérêt.







Maintenant passons au vif du sujet.

Et commençons par le plus simple, le money slavering ou quand le fait de donner de l'argent devient une humiliation source de plaisir.

"Ces hommes qui, en devenant les esclaves financiers de “money mistresses” (maîtresses financières), éprouvent excitation et épanouissement sexuels. Car donner de l’argent à l’objet de leur désir sans rien, ou si peu, obtenir en retour serait un signe fort de soumission – et la soumission, l’humiliation, voilà les moteurs de la sexualité de ces aficionados.
Appelés “pigeons”, “larbins”, “valets”, voire “petites putes”, par celles qui sont devenues leurs “dominas”, “princesses” ou encore “reines”, ils dépensent sans compter pour leur plaisir à elles… et a fortiori le leur. Virements bancaires ou PayPal, remise de cash directement près d’un distributeur automatique de billets ou encore achats de cadeaux sur une wishlist préétablie, tous les moyens sont bons pour faire des “offrandes” à leur maîtresse.."  (source Inrocks)

(Ne connaissant pas cette forme de domination, je ne développerai pas plus en détail cette pratique mais, pour ceux que le sujet intéresse, vous trouverez pas mal d’informations sur internet)



Venons en maintenant à la domination professionnelle:
Une femme (il existe aussi quelques hommes dominateurs pro) décide de faire de la domination son métier.

Pour les plus professionnelles, elles auront souvent leur donjon équipé, voire même un site internet sur lequel elles affichent leurs pratiques et conditions. 
Nous sommes là dans une démarche clairement commerciale: elles proposent des services et les hommes payent pour satisfaire leurs envies de soumission.

Les hommes qui font appel aux Dominatrices professionnelles seront soit des hommes qui ont besoin de satisfaire leurs envies dans un cadre défini et dans lesquels ils restent finalement maîtres de la situation car ils payent un service, ils choisissent une domination à la carte, soit des hommes qui, ne parvenant pas à rencontrer de femmes Dominatrices "non professionnelles", ne trouvent là que le seul moyen de vivre leurs fantasmes.

J’en lis certains qui « déplorent » (et là je reste plus polie qu’eux) que ces femmes ne dominent pas uniquement pour le plaisir. Mais, ce n’est pas parce qu’internet a permis la multiplication des profils plus vénaux que commerciaux qu’il ne reste pas des Dominatrices professionnelles qui ont une véritable passion du BDSM .


J’en entends déjà dire « si c’était une passion, elles feraient pas payer! ». Mais oui, bien sur ! 
Donc le mec qui a fait de sa passion son métier est aussi un «profiteur» ? Donc celui qui a la passion de la cuisine, il devrait ouvrir un restaurant gratuit ? Et l’ébéniste ne devrait pas vendre les meubles qu’il fabrique mais les donner ? Et quoi encore ?!
Et d'ailleurs, qui irait douter de la passion pour le BDSM de  femmes comme Madame Gala Fur?



Quant à la vénalité, si souvent décriée par certains « soumis », eh bien peut être que si les hommes arrêtaient de traiter les femmes qui aiment vraiment dominer comme de la marchandise, que si certains ne se présentaient pas juste pour satisfaire leur petites envies égoïstes sans se préoccuper un instant de l’être humain qui tient la cravache mais avec une véritable démarche humaine, alors peut-être que certaines femmes qui pratiquent le BDSM d’abord par plaisir ne finiraient pas, dégoûtées, soit par renoncer soit par se tourner vers le commerce de leurs « sévices » et par traiter les hommes qui les sollicitent de la même manière qu’eux le font avec elles, sans le moindre égard ni respect ! 
Comment reprocher à ces femmes de ne plus les voir que comme des portefeuilles quand la plupart ne les voient au fond que comme comme de simples «machines à fouetter» ou «à goder»? 
Et pour les femmes qui ont fait ce choix dès le départ, je dirai une chose simple: si il y en a autant  que le disent certains, c'est qu'il y a une demande. 

Ne trouvez-vous pas hypocrite que certains qui ne cherchent que la satisfaction de leurs pulsions (sexuelles) BDSM se plaignent que des femmes leurs fassent payer alors que eux ne donnent rien? Dans la vie vanille quand un homme a envie de sexe, il faut bien qu'il trouve une femme d'abord, puis qu'il la séduise, qu'il lui donne envie, non? S'il ne fait pas un petit peu d'efforts, il n'aura rien. Ou sinon il va voir une pro avec qui cela sera du "tout cuit"! Pourquoi cela devrait-il être différent dans le BDSM?
Alors, qui sait, peut-être que, dans ce monde qui « objetise » encore tellement les femmes, où le corps de la femme est encore utilisé pour vendre des armes ou des voitures de luxe, où tant d'hommes ne regardent encore les femmes QUE comme des objets de désirs et de plaisir, oui peut être bien que certaines femmes ont décidé qu'elles devaient être payées en retour, que de taper dans le portefeuille de certains est une façon de dominer plus puissante que de leur taper dans les c.....


Un des points communs entre le money slavering et la Domination professionnelle est que les choses sont claires, nettes et précises. L’argent est au cœur de la relation et quelles que soient les motivations qui amènent les hommes à y avoir recours, ils sont entièrement libres de leur démarche. Personne ne les forcent donc libres à eux d’y avoir ou non recours.
Et puis, franchement, vous croyez vraiment que, si il y avait moins de Dominatrices vendant leurs services, il y aurait plus de Dominatrices "amatrices"? Allons, réfléchissez un peu...


Un autre point commun est qu’il y a de tout, du meilleur comme du médiocre voire de l’arnaque. Entre des profils de money-miss derrière lesquels se cachent en fait des « brouteurs » (arnaqueurs opérant sur Internet, notamment sur les réseaux sociaux ) ou des femmes (communément appelées Domiputes dans le milieu) qui s’improvisent dominatrices en ne voyant là qu’un moyen plus «facile» que la prostitution de gagner leur vie, les hommes peuvent (et cela arrive de plus en plus souvent semble-t-il depuis l’essor des réseaux sociaux et la démocratisation du BDSM) déchanter face à certaines de leurs mauvaises expériences. Cependant, et je vais peut-être vous paraître dure, mais il en va dans ce domaine comme ailleurs, avoir des envies ne doit pas dispenser de réfléchir et si on n’est pas content du service, on va voir ailleurs. 
Retourneriez-vous dans un restaurant dont le repas ne vous a pas convenu ? Non. Diriez-vous pour autant que tous les cuisiniers sont de mauvais cuisiniers ? Non. 
Donc, next!…



Il y a cependant 
d’autres façons où l’argent peut se mêler à la domination. Des façons qui me posent réellement problème (à ma propre éthique / moralité).

Je vais vous en citer quelques-unes dont j’ai connaissance :

- la dominatrice qui accepte un soumis mais qui, sans afficher les choses honnêtement, module son intérêt envers le soumis en fonction de ce qu’il accepte ou non de payer: sorties en soirées, dîners, accessoires divers ou diverses aides financières pour soi-disant payer ses factures;
- le dominant- "coucou" qui cherche une soumise mais surtout une femme qui pourra l’héberger et l’entretenir;
- le dominant qui met son/sa soumis/e sur le trottoir;
- le dominant qui fait payer à d’autres hommes le droit de se servir de sa soumise;
- le dominant qui vend des photos de ses soumises.
Comme vous pouvez le constater, il y a là plus d’exemples concernant des Dom hommes. Cela signifierait-il que les hommes sont tout autant vénaux que les femmes mais avancent plus à couvert? Ou juste qu'ils sont plus prompts à vendre l'autre que eux-mêmes? Mais ceci est une autre débat.

Ce que je veux vous montrer par ces exemples c’est que la vénalité dans la domination peut se dissimuler sous bien des visages, qu’elle n’est pas toujours à visage découvert. 
Bien sûr, certains me diront « si il y a consentement de la part des soumis/es pourquoi pas... ». Certes… Mais où est le consentement éclairé lorsqu’il y a manipulation et/ou lorsqu’il y a dépendance psychologique? Où est le consentement éclairé lorsque la soumise découvre tout du BDSM avec ce Dom-là et qu’elle en est, en plus, amoureuse ?
Malheureusement, il y a dans le milieu BDSM (comme hors de ce milieu), tellement de personnes en état de manque affectif et/ou sexuel qu'il y  aura toujours des personnes pour en abuser.


Le milieu des cordes n’est pas épargné par ce « mariage » avec l'argent.

Si je n’ai absolument rien contre les personnes qui ont fait profession de leurs talents indéniables de cordeurs et d’enseignants de cette pratique. 
Par contre, j'ai beaucoup de mal avec ceux et celles qui voient là un filon pour se faire du fric et qui proposent de pseudo-formations où, hop, en 4 cours de 2 heures, on va pouvoir suspendre quelqu’un. Ou encore, ceux qui avancent à pas feutrés : le/la cordeur/euse super-connu/e qui contacte un-e roppe-bunny en lui demandant « tu aimerais que je te corde ? » et quand le RB réponds flatté « oui », il se voit annoncé « il faudra payer la séance ou accepter que je fasse un film pour le diffuser sur des sites payant pour adultes ».

La soumission n’échappe pas non plus aux appétits intéressés.
- la soumise qui cherche un Dom pour se faire entretenir;
- le soumis/esclave qui cherche un/une Dom pour être à demeure, pour ne plus avoir besoin de travailler et de se prendre en charge matériellement par lui-même.

Et je ne reviendrai pas sur ces Doms qui ouvrent des pseudo-écoles de BDSM, sujet que j'ai déjà abordé dans un autre article.



Et oui, ne vous en déplaise, le monde BDSM n'est pas le monde des Bisounours et les rapports entre personnes ne sont pas tous épargnés par l'argent, que cela soit de manière affichée et consensuelle ou plus insidieuse.

Mais, finalement, n'est-ce pas le reflet de notre société toute entière? Le reflet d'une société de consommation? Où même les rapports humains sont "marchandisés" et par conséquent monnayables? 
N'est-ce pas le reflet d'un monde où ce qui compte c'est le plaisir immédiat? D'un monde où les pulsions doivent être satisfaites au plus vite et sans implication humaine comme lorsque l'on se branle devant des vidéos pornos sur le net? D'un monde où l'on veut toujours plus mais avec un minimum d'effort ou d'investissement émotionnel?



Je reste néanmoins convaincue que, aussi bien dans le BDSM que dans la vie en générale, c'est à chacun d'entre nous de faire ses propres choix, de décider de ce qu'il veut vivre ou non, de décider de ce qu'il accepte ou non, de la personne qu’il veut être ou pas. Et que chaque choix, du moment qu'il est réfléchi et librement consenti, n'est ni moins bien ni mieux qu'un autre.
L'important étant d'être toujours en adéquation, honnête et bienveillant aussi bien envers soi-même qu'avec l'autre.


Lady Agnès


9 commentaires

  1. Trés beau panorama et très belle analyse de l'aspect financier dans le monde du BDSM !
    PS : Vous avez "oublié" ceux qui vendent des calendriers de leur soumise... Vu qu'il semble que ce soit différent que de vendre des photos... :D

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    1. cet article n'a pas pour but de viser telle ou telle personne précisément... d'autant que la personne à laquelle vous pensez n'est pas la seule à agir ainsi. Donc restons dans la généralité. Merci

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  2. Globalement d'accord, le sujet est complexe et très variable d'une personne (d'un couple) à l'autre. En tout cas j'aime beaucoup Votre conclusion : consentement et honnêteté !

    β

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  3. bravo!!!article bien construit et objectivité....
    c'est très clair,cela devrait en faire réfléchir quelques un....

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    1. @MiZouh Merci pour votre commentaire.
      J'ai une petite question: "quelques un" ? qui? car là je parle de plusieurs types de personnes....

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    2. bonjour Madame,
      je ne citerai personne en particulier,mais certaines personnes ont de fortes velléités contre les professionnelles...dans chaque corporation il y a des gens compétents et sérieux,et d'autres beaucoup moins,mais cela vous avez su l’écrire,

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  4. "Quant à la vénalité, si souvent décriée par certains « soumis », eh bien peut être que si les hommes arrêtaient de traiter les femmes qui aiment vraiment dominer comme de la marchandise, que si certains ne se présentaient pas juste pour satisfaire leur petites envies égoïstes sans se préoccuper un instant de l’être humain qui tient la cravache mais avec une véritable démarche humaine, alors peut-être que certaines femmes qui pratiquent le BDSM d’abord par plaisir ne finiraient pas, dégoûtées, soit par renoncer soit par se tourner vers le commerce de leurs « sévices » et par traiter les hommes qui les sollicitent de la même manière qu’eux le font avec elles, sans le moindre égard ni respect !
    Comment reprocher à ces femmes de ne plus les voir que comme des portefeuilles quand la plupart ne les voient au fond que comme comme de simples «machines à fouetter» ou «à goder»?"

    je suis pas d'accord c'est le contraire, une professionnelle c'est quelqu'un qui propose un service contre de l'argent, c'est pas par dépit des soumis qu'elles font ça par intérêt et elles se présentent comme des prestatrices de services et elles font même de la publicité pour exciter les pulsions des hommes qui font leur fortunes.

    elles ne sont pas victimes de la lubricité des hommes, au contraire elles en sont bénéficiaires :S

    en plus le vrai problème avec la vénalité, c'est que c'est très facile de trouver une Domina si tu es près à la payer, mais si tu ne l'es pas y a de très grande chance que tu n'en trouves jamais aucune...

    les soumises n'ont pas se problème là, y a pleins de Dom amateur ou qui aimeraient le devenir et qui sont même pour certains près à payer pour ça....les gays d'ailleurs et les bi ont moins de problèmes aussi du coup...les plus emmerder c'est les hommes hétéros, parce qu'on peut dire ce qu'on fait mais c'est un fait, le meilleur moyen pour un soumis d'avoir une Domina c'est d'avoir de l'argent...certaines donnent même l'impression de courir après...

    ...de plus nos choix ont des répercussions, si les Dominatrices choisissent de se comporter comme des prestatrices de service, alors c'est normal qu'elles soient considérer comme telle.

    et vu qu'elles sont très nombreuses un peu comme les soumis dont vous vous plaigniez, sauf qu'elles sont bien plus nombreuses en pourcentage sur un plus petit nombre total, d'où le faite que beaucoup s'en plaigne

    "Et que chaque choix, du moment qu'il est réfléchi et librement consenti, n'est ni moins bien ni mieux qu'un autre."

    je suis pas d'accord y a des bons et des mauvais choix, des pires et des meilleur même si on s'en rend pas compte sur le moment, les choix on des conséquences qui peuvent être bonne ou mauvais et qui peuvent nous faire regretter nos choix, d'où l'importance de faire les bons choix, vis-à-vis de nous-même et vis-à-vis des autres avec bienveillance et honnêteté, justement parce que tout les choix ne se valent pas d'où l'importance de faire le bon.

    mais j'ai apprécié votre article :) c'est rare de voir une Domina parlé de ces sujets là, votre courage vous honore :)

    j'ai apprécié également votre conclusion, et je ne peux m'empêcher de vous demander quels sont vos choix? qui voulez-vous être? que voulez-vous vivre? qu'êtes vous capable ou incapable d'accepter pour cela?

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  5. Bravo pour la qualité de votre écriture que ce soit pour la forme comme pour le fond. C'est non seulement très agréable à lire mais en plus c'est tout a fait juste. Je découvre votre blog aujourd'hui et franchement j'en suis ravi. J'en poursuivrais la lecture dès demain. Merci à Vous et Bonne soirée

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    1. merci pour vos quelques mots... et bienvenue sur mon petit bout de territoire

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