← Guide du parfait domestique (1)
Ah, Prégador, que de doux et délicieux frémissements, j’ai éprouvé
à la lecture de cet article en m’imaginant avec un soumis à demeure
dont la vie serait régie par des règles de
domesticité….
Cela
me confirme, s’il en était besoin que ma Domination est vraiment
dans cet « axe »…. et peu importe qu’il y en ait pour
me dire « esclavagiste » (MDR) alors qu’ils n’ont
fait que deux ou trois tâches ménagères pour me servir…
Le troisième volet de ce projet sera fait à quatre mains, car je foisonne d'idées
Guide
du parfait domestique (2)
par Prégador
L’Angleterre
me fascine.
La culture de la perfide Albion, ainsi que l’état
d’esprit, l’humour et bien d’autres de ses facettes, m’ont
toujours très attiré.
C’est incroyable à quel point nos
meilleurs ennemis peuvent être à la fois très proches et si
éloignés de nous…
A
ce jour, de leur culture, je n’ai évoqué que certains mythes
romanesques de la fin du XIXème.
Bien
entendu, je ne manquerai pas un jour d’évoquer les bienfaits de
l’éducation à l’anglaise.
Mais pour ce billet, qui fait
suite à celui-ci,
je vais creuser un autre aspect de l’époque victorienne (et post
victorienne) qui me plait particulièrement, à savoir la domesticité
et son fonctionnement à la fin du XIXème/début XXème siècle.
Dans
un premier temps, et c’est l’objet de ce post, je vais disséquer
la domesticité anglaise de cette époque en m’intéressant à son
histoire, à ses conditions de vie, à sa hiérarchie très organisée
et à ses règles de fonctionnement.
Le parallèle avec la
discipline domestique contemporaine parait tellement couler de
source, que dans un second temps l’élaboration d’un petit guide
moderne du parfait domestique m’a paru évident (dans un prochain
post).
Ou comment s’inspirer d’une société séculaire pour
dès à présent domestiquer son homme à demeure…
- Histoire et statut social...
Au
XIXème siècle, la population est divisée en quatre classes
sociales distinctes : la noblesse et l’aristocratie, la bourgeoisie
(« middle class »), la classe ouvrière supérieure
(« upperworking class ») et la classe ouvrière
inférieure (« lowerworking class »).
Les Victoriens
définissent la bourgeoisie comme regroupant « tous
ceux qui exercent une profession exigeant de la compétence ou de la
réflexion, et non un labeur physique ».
La noblesse et l’aristocratie sont, quant à elles, le sang bleu du
pays.
Ce sont les maisons nobles et bourgeoises qui accueillent
la plus importante domesticité (18% de la force de travail en
Angleterre). Une maison de bonne taille emploie généralement une
vingtaine de personnes ; un château peut en compter des
centaines.
Entre 1850 et la Grande Guerre, le nombre de
domestiques diminue considérablement tandis que la profession se
féminise de plus en plus.
Omniprésents,
les domestiques sont chargés de tâches très variées et occupent
des fonctions très hiérarchisées.
Ils sont bien souvent plus
à cheval sur l’étiquette et plus mondains que leurs maîtres, et
attachent une grande importance au statut que leur confère la
position sociale de ces derniers. Tout domestique nourrit ainsi le
désir de travailler au service de personnes de qualité.
En
effet, œuvrer dans une maison respectable est considéré comme un
moyen de «s’améliorer».
Toute
la bourgeoisie, de la plus haute à la plus modeste, a son (ou ses)
domestique(s). C’est une nécessité sociale que l’époque
impose. A tel point que sans serviteur, il est impossible de se
définir comme bourgeois, ce qui vous rejette de facto du côté des
prolétaires.
Ainsi,
bon nombre de personnes possédaient un domestique alors même que
leurs revenus ne leur permettaient pas.
Cette distinction
sociale participa à l’essor de la domesticité au XIXème. Marcel
Cusenier écrivait en 1912 : «Il
n’est donc pas étonnant de voir quantité de jeunes gens quitter
les travaux des champs, pénibles et peu rétribués, pour aller
servir dans les villes, comme domestiques ; ils s’en vont,
sans idée aucune de ce qui leur sera demandé, croyant tout savoir
et ayant tout à apprendre : maintien, langage, service. Les
maîtres ont le droit d’exiger de leurs domestiques, à moins que
ce ne soit des gens faibles, insouciants, sans esprit et sans
caractère qui ne savent pas se faire servir ».
« Savoir
se faire servir »… à méditer
- Vie sociale et conditions....
La
vie dans un château ou une maison bourgeoise ne peut se concevoir
sans la collaboration de deux mondes : d’une part celui des
maîtres, de l’autre celui des domestiques. Sans les seconds, les
premiers ne sauraient tenir le rôle de premier plan qu’ils
ambitionnent dans la société. Aussi les relations sont-elles
étroites entre ces deux mondes.
Ainsi, la vie quotidienne d’un
maître ou d’une maîtresse de maison qui traite mal ses
domestiques peut rapidement devenir un enfer, à l’instar de ce que
décrit une femme de chambre de l’époque :
« Ici,
personne ne lui pardonnera cela. Pour elle, il ne sera plus possible
de boire son thé chaud le matin : il sera tout juste tiède. À
chaque fois, nous serons désolés, nous nous demanderons comment
cela a pu se produire, mais cela se reproduira. Ses plus beaux
vêtements seront traités à la va-vite dans la buanderie, certains
seront même déchirés, et personne ne sera capable de désigner le
responsable. Chacun dira avoir trouvé le vêtement dans cet état.
Quant à son courrier, il sera remis à quelqu’un d’autre ou
caché entre les pages d’un livre, les messages qu’elle recevra
ou qu’elle enverra seront retardés. Son appartement va se
refroidir, pour la bonne raison que les valets seront trop occupés
pour venir allumer le feu dans ses cheminées, et son thé du soir
lui sera servi très tard. Et il ne faudra pas qu’elle compte sur
l’intendante ou la cuisinière pour y mettre le holà ! Ces deux-là
seront aussi innocentes et souriantes que nous autres, mais n’auront
pas la moindre idée de ce qui aura pu se passer. Et le majordome ne
lèvera pas le petit doigt non plus. Il a beau avoir de grands airs
et se prendre pour un duc, cet homme-là sait être loyal quand il le
faut. Il fait partie des nôtres. »
Les
domestiques commencent à travailler très jeunes, le plus souvent
vers 12 ans, mais de nombreux enfants exercent des tâches ménagères
dès l’âge de 6 ans. Dans de nombreux cas ils héritent du poste
de leurs parents. Ils sont souvent issus des campagnes car on les
pense plus travailleurs et obéissants que les gamins des villes.
Jusqu’en
1890, les domestiques n’ont pas de temps libre et doivent demander
la permission pour obtenir de brefs moments de loisir, ce qui n’est
généralement pas approuvé par leurs employeurs. Toutefois il leur
en est quelque fois donné en récompense d’un bon travail, mais il
peut être facilement supprimé en guise de punition.
L’un des
obstacles les plus courants et les plus difficiles qu’ils doivent
surmonter est la solitude et l’isolement. Pour la plupart d’entre
eux, la vie sociale « d’en bas » se restreint aux
contacts avec un ou deux autres domestiques. Ils travaillent 7j/7 et
jusqu’à parfois 16h/jour, ce qui rend cette vie sociale bien moins
facile que celle des ouvriers ou des employés de bureau qui eux
travaillent 6j/7 et 10h/jour.
Puisqu’il est interdit d’avoir
des soupirants, ils doivent toujours rencontrer leur petit(e) ami(e)
en secret. Naturellement il existe des cas, surtout dans les grandes
maisons, où des unions entre le personnel féminin et masculin se
créent. Mais si cela se sait, les deux contrevenants risquent de
perdre leur place.
La grande majorité du personnel féminin se
marie pourtant en moyenne vers l’âge de 25 ans. En général,
elles ont servi pendant 12 ans, ayant occupé entre trois à cinq
postes. Une fois mariées, elles éprouvent beaucoup de difficultés
à conserver leur travail, car la société attend d’elles qu’elles
s’occupent de leur mari et de leurs enfants.
A
partir de 1890 les domestiques reçoivent une semaine de congés par
an et dépensent généralement toutes leurs économies de l’année
pour s’offrir un billet de train. Le prix des transports implique
que la plupart d’entre eux ne voient pas leurs amis ou familles
pendant plusieurs mois, voire plusieurs années.
Le salaire
qu’ils perçoivent est assez faible du fait qu’ils sont nourris,
logés, habillés et blanchis. Ils ont cependant la possibilité
d’améliorer leur ordinaire grâce à quelques avantages en nature
: de la part des commerçants qu’ils visitent pour le compte de
leurs employeurs, grâce aux étrennes, aux cadeaux divers ou aux
restes de nourritures et fournitures non utilisés, offerts par les
maître(sse)s.
Un
exemple des gages perçus à l’époque victorienne par le personnel
féminin, vers 1890 (le coût de la vie n’étant pas précisé,
c’est uniquement pour représenter les écarts selon le poste) :
Fonction
|
Age
moyen
|
Gages
annuels
|
Bonne
débutante
|
19
|
£10
|
Fille
de cuisine
|
19-20
|
£13
|
Bonne
|
20-25
|
£16
|
Bonne
particulière
|
25-30
|
£20
|
Cuisinière
(aide)
|
25-30
|
£20
|
Femme
de chambre
|
30-36
|
£24
|
Cuisinière
/ intendante
|
40
|
£35
|
Intendante
|
40
|
£52
|
| | |
En
ce qui concerne les conditions de vie des domestiques, elles sont
bien souvent très spartiates.
Il dorment pour la plupart dans
la cuisine ou dans des placards sous les escaliers. Ce n’est que
sur la fin de l’ère domestique qu’ils bénéficient de chambres
dans les combles, mais elles sont froides, humides, sans eau et mal
éclairées.
De plus, leurs employeurs y interdisent toutes
décorations personnelles (photographies, tableaux, etc…). Ils
s’arrogent même le droit de fouiller dans leurs affaires quand bon
leur semble. Les manuels de la bonne société de l’époque
indiquent que « la
chambre d’un domestique ne doit comporter qu’un minimum
d’articles nécessaires au confort« .
Cependant,
les hommes continuent souvent à dormir au RDC afin de protéger la
maisonnée.
Les
cuisines (qui font aussi office de chambre donc) sont petites,
encombrées et peu ou pas aérées du tout. La bonne doit y passer
son existence sans pouvoir se retourner aisément, avec la chaleur
des fourneaux, les fumées, les odeurs la poussière, ce qui la force
à travailler fenêtres ouvertes été comme hiver. Conséquence de
cette absence totale d’hygiène et de réglementation du travail :
surmenage, maladie (anémie, tuberculose…), troubles mentaux…
La
charge de travail quotidienne est lourde et épuisante, les heures
sont longues, mais en dépit de tout cela la vie n’est pas toujours
mélancolique et triste. Il y a aussi des moments de plaisir, de joie
et de satisfaction.
Malgré la nature monotone et frustrante de
leur statut, la plupart des domestiques sont très fiers de leur
travail et se révèlent souvent efficaces et compétents au service
de leurs employeurs. Ils apprécient grandement toutes les occasions
de distraction, de loisir et de temps libre qui leur est accordé.
- Hiérarchie et tâches...
Le
nombre de domestiques dans une maison ou un château peut être assez
élevé dans certains cas. Afin de s’y retrouver, et pour le bon
fonctionnement des lieux, une hiérarchie est instaurée au sein des
employés. Chacun occupe un poste particulier et se doit d’observer
des règles strictes.
La
chaîne de commandement distingue ainsi deux grandes catégories :
les domestiques « d’en haut » et ceux « d’en
bas ». Les maître(sse)s sont bien sûr tout en haut de la
pyramide. Dans chaque catégorie, une hiérarchie interne existe
également en fonction de la spécialité de chacun(e).
A noter,
en dehors de toute notion de hiérarchie, que les deux pivots d’une
maisonnée sont le majordome (en contact direct avec l’employeur,
il sert d’intermédiaire entre celui- ci et les domestiques) et le
chef cuisinier.
Les
domestiques « d’en haut » sont, dans l’ordre
hiérarchique :
- la
gouvernante (governess
en anglais) ; elle n’est pas tout à fait une domestique ni
vraiment un membre de la famille, et est considérée comme
appartenant à la bourgeoisie. La gouvernante est chargée des
enfants quand ceux-ci ne sont plus en âge d’être placés sous les
soins de la nurse. Elle les éduque et leur apprend les règles du
savoir-vivre. Elle peut aussi faire office de dame de compagnie pour
Madame et accompagne la famille dans ses déplacements. Elle vit au
même étage que ses maître(sse)s.
- le
précepteur (private
tutor) ; de par son savoir il bénéficie d’un statut privilégié
dans la maisonnée. Il donne des leçons particulières aux enfants
des employeurs dans les matières nobles (sciences, humanités, etc).
- le
majordome (butler)
; il est exclusivement attaché au service des maîtres et occupe un
poste de confiance. Il se distingue pas son excellente présentation,
sa fidélité, son honnêteté, son ardeur au travail et sa
discrétion. Il dirige l’ensemble des domestiques de la maisonnée
et n’accomplit aucune tâche ménagère, à part peut-être
l’ouverture des bouteilles de grands crus. Il est aussi chargé de
la sécurité, du nettoyage de l’argenterie et des biens de
valeurs. Il gère la disposition de la table et annonce le repas au
maître de maison. Durant le repas, il se contente de découper les
viandes et de retirer les couvercles des plats. A la fin de la
journée, il s’assure que toutes les fenêtres soient bien fermées,
que la vaisselle soit bien rangée et que toutes les cheminées
soient sécurisées. Sa tâche principale est de superviser le
bon fonctionnement de la maisonnée et de diriger la domesticité
masculine, depuis son petit bureau.
- l’intendante (housekeeper)
; elle engage et dirige la domesticité féminine. Elle s’occupe
des achats, des dépenses quotidiennes, de l’approvisionnement et
de l’inventaire pour la cuisine, des clés de la maison, ainsi que
des comptes. Son petit bureau est près de la cuisine. Elle gère
aussi tout le linge de maison, veillant à ce que les maîtres et le
personnel aient toujours à disposition du linge et des draps
propres; elle supervise également le nettoyage des meubles. Elle est
placée directement sous les ordres de la maîtresse de maison et
organise le travail de la maisonnée en accord avec les instruction
de celle-ci. On l’appelle « Madame untel »
(« Mistress » en anglais).
- le
chef/la cuisinière (chef,
cook) ; le chef (ou la cuisinière) règne en maître sur la cuisine
comme un général sur son armée (d’où le terme de brigade).
Il/elle dirige les petites mains chargées des travaux de base,
veille à la confection de tous les repas de la maisonnée, ceux des
maîtres, des invités comme ceux des domestiques, et reçoit les
demandes spéciales par l’entremise de l’intendante. Mais
l’inventaire des produits et ingrédients ne lui incombe pas
puisque ce privilège revient à l’intendante.
Toujours
parmi les domestiques « d’en haut », mais plus bas dans
l’échelle, viennent ensuite les domestiques « personnels »,
au service plus intime des maîtres :
- le
valet de chambre (valet)
; très dévoué, il s’occupe des vêtements (disponibilité,
entretien), des armes et des effets personnels du maître. Il veille
à l’application du code vestimentaire de son maître, tant pour
ses diverses rencontres journalières que lors des soirées
mondaines. Il prend à sa charge les tâches de l’intendante en cas
de célibat de son maître et d’absence de personnel féminin. Il
lui arrive aussi de servir de garde du corps. Le valet de chambre
partage donc l’intimité de son maître de maison, d’autant plus
qu’il l’aide à la toilette et à son habillage.
- la
camériste, ou femme de chambre (Lady’s
maid) ; elle s’occupe de la garde-robe des Dames de la maison, les
coiffe, les habille (pour les petites et grandes occasions) et les
aide dans leur toilette. Une femme de chambre est spécialement
chargée d’accueillir les visiteurs. Sélectionnée sur son
apparence physique, elle a pour mission de traverser le salon de
réception tête haute et de faire froufrouter ses jupons (tenue de
rigueur exigée donc) pour aller ouvrir la porte d’entrée. Elle
recueille à l’occasion les confidences de ses maîtresses, tout en
se gardant de leur donner des conseils.
- la
garde-malade (home
nurse) ; elle est une infirmière privée qui s’occupe des maîtres
dont la santé est souffrante. Elle n’est embauchée qu’à titre
temporaire mais est logée dans la demeure
Les
domestiques « d’en bas » (voués aux travaux plus
grossiers et aux tâches quotidiennes), appelés aussi « petit
personnel », sont, dans un ordre plus ou moins hiérarchique :
- la
nourrice ou bonne d’enfants (nurse)
; elle s’occupe des enfants en bas âge, jusqu’à ce qu’ils
soient confiés à la gouvernante.
- la
servante ou bonne (maid)
; la fameuse « soubrette » (terme qui désigne en fait
une petite servante) telle qu’on l’appelait à l’époque. Elle
est chargée de l’époussetage, d’aider au nettoyage de
l’argenterie, de mettre la table, de servir les repas, de nettoyer
et ranger les chambres et les salles de bains. Elle est également en
charge du petit ménage, de la couture, des lessives, de faire
chauffer l’eau des bains, d’entretenir les parquets, de faire les
vitres, de cirer les chaussures et de vider les pots de chambre.
- la
lingère (laundry
maid) ; dans une grande, voire très grande maisonnée, c’est la
bonne plus spécialement chargée de laver et d’entretenir le linge
de maison.
- le
valet de pied ou laquais (footman
lackey) ; il est l’homme à tout faire de la maison et l’équivalent
masculin de la servante. Ses tâches sont donc très variées et
nombreuses : il porte les bagages, tire l’eau du puits, est
responsable du bon fonctionnement des poêles, nettoie les latrines,
aide à l’entretien de l’argenterie, fait les courses, assure le
service des repas, nourrit les chiens et de manière générale prête
main- forte à tous ceux qui ont besoin d’aide. Il accompagne aussi
le maître des lieux à la chasse, lui sert son petit-déjeuner et
fait office parfois de garde. Il est choisi pour sa prestance et sa
belle apparence.
- le
garçon de course (page)
; il est chargé de porter les lettres et les cartes de visites,
ainsi que d’aller parfois chercher les achats des maîtres.
- le
cocher, postillon ou chauffeur (coachman,
driver) ; il est chargé de véhiculer les maîtres, que ce soit en
calèche ou en « automotive ». Il s’occupe également
des petits travaux de réparation de la maison. Il lui arrive de
s’occuper des chevaux.
- le
groom ;
jeune laquais d’écurie voyageant à l’arrière sur le
marche-pied des voitures hippomobiles. Il ouvre la portière, aide
les Dames à descendre, porte les paquets dans les coffres…
- le
garde-chasse (game-keeper)
; il veille sur le parc et les bois du domaine, empêche les
braconniers de sévir et entretient le gibier. Il prépare les
chasses du maître et l’y accompagne.
- le
jardinier (gardener)
; il soigne et entretient les jardins
- le
palefrenier ou garçon d’écurie (stable
boy) ; il est chargé de l’entretien des écuries, s’occupe des
chevaux et de la basse-cour, scie et coupe du bois pour le chauffage,
fait des travaux de jardinage, s’assure que le chemin qui mène au
château est en bon état et que l’escalier est bien accessible.
Lors des sorties il s’assied à côté du cocher.
- l’aide
de cuisine (scullery
maid) ; elle allume les fourneaux, porte les seaux d’eau depuis le
puits, épluche les légumes, lave la vaisselle et aide de manière
générale à préparer les repas. Elle est bien sûr au service du
chef ou de la cuisinière. Quand lors de très rares occasions elle
quitte la cuisine, elle a le devoir de se faire toute petite pour se
rendre dans d’autres pièces (par exemple pour aider au nettoyage
des cheminées ou toute autre tâche ménagère dite ingrate). Sa
seule présence dans les pièces du domaine peut créer un fort
malaise.
- le
valet de ferme ;
employé dans une exploitation agricole ou viticole. Il est le
manœuvre
ou ouvrier agricole.
- Vie sociale et conditions...
La
hiérarchie seule ne suffit pas à la bonne tenue d’une maisonnée.
L’ordre est une chose, mais la présentation, la bonne attitude et
la discipline sont nécessaires afin d’obtenir une armée de
serviteurs la plus efficace possible.
De plus, à cette époque,
la bonne tenue de cette fourmilière reflète bien souvent la
prestance de leurs maîtres en société, spécialement lorsque des
invités sont conviés à demeure.
Ainsi, outre les tâches à
exécuter, les domestiques se doivent d’adopter une attitude et une
présentation impeccables.
La
tenue, pour commencer. Elle est ce qui saute aux yeux de chacun avant
toute compétence éventuelle. Elle permet aussi de distinguer les
rôles de chaque serviteur. Une tenue d’un domestique qui oeuvre au
sein de la demeure (il en est évidemment autre pour les jardiniers,
palefreniers, etc…) se doit d’être neutre, c’est à dire noire
et blanche, parfaitement propre et repassée, mais aussi adaptée à
la tâche (une cuisinière portera le tablier, une servante la tenue
de soubrette, alors qu’un majordome devra porter noeud papillon et
costume trois pièces, par exemple). Les maîtres étant confrontés
quotidiennement à leur personnel, il va de soi que leur regard soit
critique. L’habit faisait le moine en ce temps là, mais il
motivait aussi à s’investir au mieux dans sa tâche.
La
discipline est également très rigoureuse. Les domestiques sont
tenus d’exécuter immédiatement les instructions des maîtres du
mieux qu’ils peuvent et sans contestation aucune, sous peine de se
voir sanctionner ou même renvoyer sur le champ dans le pire des
cas.
Comme pour toute discipline bien huilée, il est nécessaire
d’obéir à plusieurs règles très strictes. De manière générale,
elles sont régulièrement rappelées aux domestiques, en plus d’être
apprises dès leur arrivée. A noter que ceux « d’en haut »
connaissent déjà parfaitement les codes de par leur grand
professionnalisme. Il est donc fort logique qu’ils soient encore
plus sévèrement sanctionnés lorsqu’ils faillissent, puisqu’ils
sont censés donner l’exemple.
Voici
les règles érigées les plus usitées et importantes que les
domestiques doivent respecter (l’ordre n’indique aucune
hiérarchie spécifique ):
- Lorsque
vous croisez les maîtres dans la maison ou dans le jardin, vous
devez leur céder respectueusement la place en vous faisant le plus
invisible possible (rasez les murs et détournez le regard). D’une
manière générale, soyez le plus invisible possible.
- En
présence de Madame, ne parlez jamais à un autre domestique, même
de votre rang, ou à un enfant, à moins que vous n’y soyez
contraint par la nécessité du service. Dans ce cas parlez
brièvement et le plus doucement possible.
- Lorsque
vous parlez aux maîtres, vous êtes tenus de les appeler
« Madame », « Mademoiselle » ou « Monsieur »
(en anglais « Miss », « Mrs » ou « Sir »),
et ce dans chacune de vos phrases.
- Quand
on s’adresse à vous, restez tranquille, gardez les mains
immobiles et regardez toujours la personne qui vous parle.
- Les
Dames et Messieurs ne doivent jamais entendre votre voix, à moins
qu’ils ne se soient directement adressés à vous en vous posant
une question ou par nécessité absolue de service. Quand vous
répondez, parlez le plus brièvement possible. D’une manière
générale, ne faites aucun bruit audible par les maîtres.
- Pour
le « petit personnel », tels que valet de pied ou aide
de cuisine, il est strictement interdit de s’adresser aux maîtres,
pas même par nécessité de service. En ce dernier cas, il vous
faut vous adresser à un supérieur hiérarchique « d’en
haut » afin qu’il transmette lui-même l’information aux
maîtres.
- Quand
cela est possible, les effets personnels tombés à terre (lunettes,
mouchoir ou autres petits objets) doivent être rendus à leur
propriétaire sur un plateau.
- Répondez
toujours (sauf demande express contraire) quand vous avez reçu un
ordre. Ne pas oublier l’entête (« Madame »,
« Mademoiselle » ou « Monsieur »), même
pour les invités.
- Ne
donnez jamais votre avis à votre employeur ou à un invité.
- Sauf
pour répondre à une salutation qui vous est offerte, ne dites
jamais « bonjour » ou « bonsoir » à votre
employeur.
- Quand
vous accompagnez Madame ou Monsieur pour porter des paquets, ou pour
toute autre raison, restez toujours à quelques pas derrière.
- Vous
devez toujours être à l’heure et à votre place au moment des
repas (ou tout autre moment selon votre tâche).
- Vous
n’avez pas le droit de recevoir des parents, des amis ou des
visiteurs dans la maisonnée, pas plus que d’introduire une
personne dans les parties communes qui vous sont attribuées, sans
le consentement du majordome ou de l’intendante.
- Les
petit(e)s ami(e)s sont strictement interdit(e)s.
- Les
objets cassés et les dégâts faits dans la maisonnée sont déduits
des gages.
- La
gouvernante n’a pas le droit de s’associer intimement à la
famille ni de se sentir à l’aise avec les autres domestiques.
- Les
parties de la maisonnée réservée aux maîtres englobent les
salles aux rdc (boudoir, salle à manger, jardin d’hiver, grand
salon, fumoir, bibliothèque, bureau, etc.) et les appartements
privées aux étages. Elles sont strictement interdites aux
serviteurs, sauf pour y travailler. Les seules parties autorisées
sont le sous-sol ou le dernier étage pour les chambres (cuisine ou
soupentes sous les escaliers pour ceux qui y dorment).
Toutes
ces règles et bien d’autres encore se lisent dans ces documents de
l’époque :
Le
« Manuel
des bons domestiques »
(1896) qui conseille par exemple d’avoir des domestiques soignés
qui « se
laveront les mains, seront peignés et auront des vêtements en ordre
avant de prendre leur service« .
Autre
exemple, le « Manuel
complet des domestiques »
(1836) demande aux domestiques « une
obéissance portée jusqu’à l’abnégation, une fidélité
scrupuleuse, un zèle de tous les instants, une discrétion à toute
épreuve, de l’ordre et du désintéressement« .
Enfin,
le « Manuel
du valet de chambre »
(1903) nous dit : « On
ne saurait trop insister sur ce point; un domestique qui approche ses
maîtres, qui vit dans leur intimité, ne doit pas se rendre
désagréable à la vue ni à l’odorat; il doit donc avoir un soin
tout particulier de sa personne; se laver souvent à fond; changer
fréquemment de linge et de chaussettes; avoir toujours les cheveux
en ordre, le visage bien rasé, les mains et les ongles aussi propres
que le permet le travail. Ne pas se servir de cosmétique, ni de
pommade ni d’aucun parfum« .
22
JUILLET 2018 PAR PREGADOR